Historique.

La science magnétique comprend un certain nombre de divisions, suivant qu'on l'applique à différentes catégories de phénomènes. Nous nous contenterons de signaler ici les faits qui ont rapport au dégagement de l'âme, laissant de côté l'aspect thérapeutique de cette science cultivée par nos ancêtres. Sans faire l'histoire détaillée du magnétisme, nous pouvons rappeler qu'il fut connu de tout temps. Les annales des peuples de l'antiquité fourmillent de récits circonstanciés qui relatent la profonde connaissance qu'avaient du magnétisme les prêtres anciens.

Les mages de Chaldée, les brahmes de l'Inde guérissaient par le regard au moyen duquel ils procuraient le sommeil. Aujourd'hui encore, en Asie, les prêtres sont en possession des secrets de leurs prédécesseurs, et particulièrement dans l'Indoustan, les fakirs cultivent avec succès les pratiques magnétiques, ainsi que le racontent tous les voyageurs qui ont parcouru ces contrées.

Les Egyptiens ont puisé leur religion et leurs mystères à la grande source de l'Inde ; ils employaient pour le soulagement des souffrances les passes et attouchements tels que nous les exécutons encore de nos jours. Hérodote cite dans plusieurs passages les sanctuaires où se rendaient les pèlerins désireux de se guérir au moyen des remèdes que les hiérophantes découvraient en songe. Diodore de Sicile dit positivement que les malades arrivaient en foule dans le temple d'Isis pour y être endormis par les prêtres. La plupart des patients tombaient en crise et indiquaient eux-mêmes le traitement qui devait les ramener à la santé.

Le temple de Sérapis d'Alexandrie était renommé pour rendre le sommeil à ceux qui en étaient privés. Strabon rapporte qu'à Memphis, les prêtres s'endormaient et, dans cet état, donnaient des consultations médicales. L'histoire est remplie de récits de cures obtenues de cette manière. Arnobe, Celse et Jamblique enseignent dans leurs écrits que, chez les Egyptiens, il existait de tout temps des personnes douées de la faculté de guérir, au moyen d'attouchements et d'insufflations, et qu'elles réussissaient souvent à faire disparaître certaines affections réputées incurables.

Les Grecs, à leur tour, empruntèrent un grand nombre de connaissances aux peuples de l'Egypte, et ne tardèrent pas à égaler, sinon à surpasser leurs maîtres. Les hiérophantes qui desservaient l'autel de Trophonius s'étaient acquis une grande célébrité dans ces matières. Ce qui prouve que le magnétisme était fort répandu à cette époque, c'est qu'au dire d'Hérodote, des prêtres firent périr par jalousie une magicienne qui opérait des guérisons au moyen de frictions magnétiques.

Apollonius de Thiane, l'illustre thaumaturge, n'ignorait pas ces pratiques ; il guérissait l'épilepsie au moyen d'objets magnétisés, prédisait l'avenir et annonçait les événements qui se passaient au loin. On a conservé le souvenir de l'anecdote suivante :

Dans sa vieillesse, le philosophe s'était réfugié à Ephèse. Un jour qu'il enseignait sur la place publique, ses disciples le virent s'arrêter tout à coup et s'écrier d'une voix vibrante : «Courage, frappe le tyran !» Il s'interrompit encore quelques instants, dans l'attitude d'un homme qui attend avec anxiété, et reprit : «Soyez sans crainte, Ephésiens ! le tyran n'est plus, il vient d'être assassiné.» Quelques jours après, on apprit qu'au moment où Apollonius parlait ainsi, Domitien tombait sous le poignard d'un affranchi.

Les Romains eurent aussi des temples où l'on reconstituait la santé par des opérations magnétiques. Celse rapporte qu'Asclépiade de Pruse endormait magnétiquement les personnes atteintes de frénésie. Gallien, un des pères de la médecine moderne, supprimait certaines maladies par les applications de ces mêmes remèdes qui le firent passer pour sorcier et l'obligèrent de quitter Rome. Ce célèbre savant avouait qu'il devait une grande partie de son expérience aux lumières qui lui étaient venues en songe. A ce propos, Hippocrate disait que la meilleure médecine était celle qu'on lui indiquait pendant le sommeil. Mais l'homme qui obtint la plus grande renommée dans ces matières fut Simon, dit «le magicien », qui, en soufflant sur les épileptiques, détruisait le mal dont ils étaient atteints.

En Gaule, les druides et les druidesses possédaient à un très haut degré la faculté de guérir, comme l'attestent un grand nombre d'historiens ; leur médecine magnétique était devenue si célèbre qu'on venait les consulter de toutes les parties du monde. Il est facile de s'assurer combien leur renommée était universelle en consultant Tacite, Pline et Celse. Pendant le moyen âge, le magnétisme fut surtout pratiqué par les savants. Le clergé, ignorant et superstitieux, craignait l'intervention du diable dans ces opérations, un peu étranges, de sorte que cette science resta l'apanage des hommes instruits.

Avicenne, fameux docteur qui vécut de 980 à 1036, écrivait que l'âme agit non seulement sur son corps, mais aussi sur les corps étrangers qu'elle peut influencer à distance.

Ficin, en 1460 ; Cornélius Agrippa, Pomponace, en 1500, et, surtout, Paracelse, leur contemporain, posèrent les bases du magnétisme moderne tel qu'il devait être enseigné plus tard par Mesmer.

Arnaud de Villeneuve puisa chez les auteurs arabes la connaissance des effets magnétiques, et ses succès devinrent bientôt si grands qu'il s'attira la haine de ses confrères et fut condamné par la Sorbonne.

Dès 1608, Glocénius, professeur de médecine à Marbourg, fit paraître un ouvrage traitant des cures magnétiques. Dès cette époque il essaie de donner une explication rationnelle de ces phénomènes.

Van Helmont disait, en réhabilitant la mémoire de Paracelse, dont il fut le continuateur : Le magnétisme n'a de nouveau que le nom, il n'est un paradoxe que pour ceux qui rient de tout et qui attribuent à Satan ce qu'ils ne peuvent expliquer... Il y a dans l'homme, dit-il plus loin, une telle énergie qu'il peut agir en dehors de lui et influencer d'une manière durable un être ou un objet dont il est éloigné... Cette force est infinie dans le Créateur, mais limitée chez la créature par les obstacles naturels. Ces conceptions nouvelles, ces vues hardies furent attaquées par l'Eglise, que l'on trouve toujours sur la route des novateurs, acharnée à leur barrer le passage, et le célèbre médecin fut obligé de se réfugier en Hollande, où était déjà le grand Descartes.

Van Helmont fut secouru dans sa lutte par un Ecossais nommé Robert Fludd ; plus tard, Maxwell, en 1679, soutint les mêmes idées. Le Père Kircher, parlant de Robert Fludd, disait que ses écrits avaient été inspirés par le diable ; cependant il cite de nombreux exemples de sympathies et d'antipathies, et donne même des indications pour bien magnétiser.

A la date de 1682, nous avons à signaler Greatrakes, en Angleterre, qui fit des miracles en opérant simplement par des attouchements, sans chercher d'ailleurs à se rendre compte de la manière dont l'action s'opérait.

En France, Borel et Vallée, au commencement du XVII° siècle, employèrent le magnétisme par insufflations pour combattre les maladies nerveuses rebelles à tout autre traitement. Gassner remplit l'Allemagne du bruit de ses succès obtenus par le magnétisme tel qu'il se pratique de nos jours. Il fixait énergiquement son regard sur les yeux du malade et le frictionnait du haut en bas en secouant les doigts lorsqu'il arrivait à l'extrémité, comme pour en chasser les principes mauvais qui y étaient contenus.

Nous ne raconterons pas l'odyssée de Mesmer ; elle est trop connue pour que nous croyions nécessaire de la reproduire : il suffit de signaler que la vulgarisation de la science magnétique lui est due.

Le magnétisme est étudié méthodiquement de nos jours, et une remarquable propriété découverte par le marquis de Puységur lui fit faire des pas de géant : nous voulons parler du somnambulisme provoqué, qui fera l'objet de notre prochaine étude. Notre but n'étant pas de nous étendre sur l'histoire du magnétisme, nous terminons ici cet aperçu. Nous avions simplement l'intention de montrer que cette science, raillée par les ignorants ou les gens à parti pris, a une glorieuse généalogie et que son origine remonte aux époques les plus reculées.

Il y a encore peu de temps, on attribuait à la crédulité et à la superstition tous les récits des anciens relatifs aux guérisons magnétiques. Actuellement, les recherches sur ce point ayant fait voir que l'on pouvait obtenir les mêmes résultats, on est plein d'admiration pour ces prêtres qui possédaient une science si complète de la vie, et qui l'exerçaient avec tant d'habileté.